#17 Les normes dans le couple et les relations amoureuses

Avec Charlotte du compte @lacelibataire_lavraie

Depuis qu’on est toute petite, en tant que femme, on nous apprend qu’être en couple et avoir un mec, c’est le but ultime, ce qu’il faut absolument accomplir pour être pleinement épanouie et heureuse. Pourtant, les normes autour du couple cis hétéro peuvent être très oppressantes. On en parle avec Charlotte, du compte Instagram @lacelibataire_lavraie.

A travers son contenu, Charlotte décomplexe et déconstruit les idées reçues et les injonctions qui pèsent sur le célibat des trentenaires (notamment, mais pas que). Charlotte a aussi écrit le livre “Célibataire mode d’emploi”, publié aux éditions Mango Society.

La vie sociale du couple

Saviez-vous que lorsqu’on est en couple, notre vie sociale est moins riche que lorsqu’on est célibataire ? Alors cette image de la célibataire seule avec ses chats, elle est finalement seulement dans notre tête ! En effet, une étude explique que les célibataires ont tendance à rester en contact plus facilement avec leurs parents, leurs frères et sœurs, leurs voisins et leurs amis, que les personnes mariées. » En somme, les gens célibataires sont plus entourés et ont une vie sociale plus riche que les gens en couple parce qu’ils entretiennent ces liens sociaux¹.

Charlotte rejoint cette idée « Quand on est en couple on va plus facilement se laisser aller, rester seulement avec son conjoint. On nous a toujours appris que la relation de couple c’était la relation ultime dans une vie. J’ai fait un sondage sur mon compte et j’ai demandé à mes abonnés s’ils avaient déjà été en couple parce qu’ils avaient peur d’être seuls. Le chiffre était vraiment haut, 80%. C’est assez ironique de voir qu’au final, on se retrouve plus seul·e quand on est en couple. Combien de personnes autour de nous changent dès qu’ils sont dans une relation amoureuse et ne font plus que tout à deux, partir en vacances, en week-end ? Il y a des gens que tu ne vois plus quand ils se mettent en couple, ils disparaissent complètement. Beaucoup s’enferment dans ce type de relation et ne voient plus qu’une seule personne, leur partenaire. »

Des amies d’enfance disparaissent. Depuis qu’elles couplent, elle a la surprise de trouver leurs mecs à tous leurs rendez-vous. Que viennent-ils faire dans leur histoire ? Elle n’a rien à leur dire. Pas envie de leur faire de la place. Ni de ces discussions insipides, condamnées à barboter bêtement à la surface à cause d’eux. Certaines amies ont des nous plein la bouche. Se définissent en deux, vivent en deux, pensent en deux. Elles verrouillent leur intimité, se taisent et du coup, la font taire. C’est lui maintenant mon premier confident, lui explique une amie. Elle ne comprend pas cette hiérarchie, ni pourquoi elle a la médaille d’argent, deuxième place sur le podium. Comme si elle avait patienté avec son amitié en attendant le grand soir, ce type assis sur le canapé qui n’a même pas l’air curieux. Comme si l’amitié c’était de l’amour en moins bien, quelle conne.

Extrait d’À mains nues d’Amandine Dhée².

Depuis toujours on nous dit que la clé du bonheur ultime c’est de tout faire ensemble, de vivre ensemble … Vous savez, le fameux escalator de relation où il faut cocher toutes les cases du couple parfait : « cet escalator de relation c’est l’attente sociale selon laquelle une relation romantique doit automatiquement suivre un ensemble d’étapes et mener au mariage, à la parentalité et à l’accession à la propriété ».

Pourtant, il ne devrait pas y avoir de règles, que ce soit pour les couples ou pour les célibataires. Dire que les couples doivent cocher toutes ces cases, c’est aussi ridicule que de dire que tous les célibataires devraient avoir une vie sexuelle débordante et sortir tout le temps. Chacun doit faire ses propres règles, il n’y a pas de modèle. Arrêtons d’imposer un modèle.

Déconstruire les normes autour du couple

Dans mon entourage il y a des gens assez ouverts d’esprit, qui essaient de déconstruire les codes, les normes autour du couple, d’avoir d’autres modèles de relations, mais ça reste une minorité. Pour la majorité c’est le couple exclusif qui prime, il faut coller au cadre. Dans les relations à distance tout le monde te dit que ça ne marchera pas. Qui a décidé qu’un couple devait forcément habiter ensemble, partager un lit, pour être heureux ? Quand j’étais plus jeune j’étais la première à être dans ces schémas plein de clichés. Aujourd’hui quand je regarde les couples dans mon entourage, peu me font envie. Alors pourquoi pas faire ses propres règles, créer ses codes à soi ?

La pression est forte, quand on tente de déconstruire les normes. Quand j’ai partagé sur mon compte Instagram qu’on avait le droit de faire lit séparé quand on est en couple, j’ai eu plein de réactions du genre « merci de le dire parce qu’autour de moi personne ne comprend, tout le monde me juge ». Dès que je suis en couple, je suis très indépendante et les jugements vont bon train. Si tu sors sans ton conjoint, ça dérange et tu te prends des réflexions. Pourtant, on est bien une personne avant d’être un couple. Les clés des relations qui fonctionnent c’est d’avoir chacun ses moments, chacun sa vie, de créer la distance … Et pourtant j’ai l’impression que ça reste une minorité alors que de nombreux spécialistes nous disent que ce serait la solution à un couple sain.

Un conditionnement autour du couple

On a sur-romantisé l’amour, on a glamourisé les relations amoureuses, on a dit que c’était génial, que ça allait nous rendre épanouies, que ça allait nous sauver. J’entendais un groupe d’ado qui parlait de mecs et je me suis revue plus jeune, tout tournait autour des mecs quand j’avais leur âge. Avec mes copines, on voulait toutes être en couple.

Depuis toute petite, surtout les femmes, on nous apprend que rencontrer le fameux prince charmant est le but ultime de notre vie. Il faut être en couple, avoir des enfants, et c’est seulement là que tu seras dans un accomplissement ultime. Ça commence avec les dessins animés, ça continue dans toutes les séries, toutes les meufs cherchent des mecs, il n’y a pas ou peu de modèles de femmes célibataires. Dans les lectures, tu as toujours le rôle de la femme séductrice, de la maman … Et toutes ont le même but, celui de trouver un mec et de tout faire tourner autour de lui. L’image des femmes célibataires a pendant longtemps été celle de la sorcière, la vieille fille avec plein de chats donc on a peu de modèles de femmes non accompagnées hyper épanouies, alors qu’il y en a plein mais on n’en a pas fait des modèles. Ça sous-entend forcément qu’être célibataire, c’est mal. Donc quand tu es une petite fille et que tu grandis, tu te dis « il faut que je rencontre un mec, il faut que je sois en couple ».

Il n’y a pas de mal à être en couple et à vouloir l’être, mais il peut être intéressant de se questionner sur ce que l’on attend de sa relation et surtout, créer ses propres règles pour être réellement épanoui·e.

Merci à Charlotte pour cet entretien passionnant. Vous pouvez la retrouver sur son compte Instagram @lacelibataire_lavraie et acheter son livre “Célibataire mode d’emploi”, publié aux éditions Mango Society.

1. https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0265407515597564

2. Dhée, Amandine. À mains nues. Editions La Contre Allée.